Poveglia, vous connaissez ?
Poveglia est une ile qui se trouve dans la lagune de Venise. Car oui dans cette lagune, il y a Venise, la Sérénissime, mais il y a aussi une soixantaine d’îles – difficile d’avoir le nombre exact – aux destins multiples. Parmi elles, Poveglia, qui nourrit nombre de fantasmes et qui serait hantée par des milliers de fantômes. Une île interdite aux touristes bien sûr.
Il s’en dit des choses sur Poveglia. Il se dit qu’on y envoyait les malades de la Peste noire dans les années où s’est répandue à Venise la terrible épidémie. Il se dit qu’on jetait vivantes dans des fosses communes les personnes à peine malades, les laissant succomber à d’horribles souffrances.
Il se dit qu’il y a aurait là, sur les 7 hectares et demis que compte Poveglia, plus de 160 000 cadavres enfouis. Il se dit aussi qu’en 1922, un hôpital psychiatrique fut bâti sur l’île. Les pauvres gens déjà fous qui y étaient envoyés étaient tourmentés dès leur arrivée à Poveglia par les esprits des victimes de la peste. De quoi faire le bonheur d’un médecin cruel qui pratiquait lobotomies et autres expériences médicales sordides. Il se dit que lui-même aurait été victime des mêmes phénomènes, et se serait suicidé en se jetant du clocher de l’église de Poveglia. Depuis lors l’ile maudite serait abandonnée.
Mais tout ceci ne serait que rumeurs d’Orléans ! En réalité, il y aurait bien eu des quarantaines, mais sur les iles voisines de Lazaretto Nuevo et Lazaretto Vecchio. D’ailleurs, le mot Lazaretto se traduit en français par lazaret, un lazaret étant selon le Petit Robert « un établissement où s’effectue le contrôle sanitaire, l’isolement des malades contagieux, dans un port, ou une station frontière. Subir une quarantaine au lazaret… ».
Parmi elles, Poveglia, qui nourrit nombre de fantasmes et qui serait hantée par des milliers de fantômes.
Quant à l’hôpital pyschiatrique si il a bien existé, c’est sur l’ile voisine de San Clemente. Et pour le coup nous en avons des preuves puisque Raymond Depardon y a tourné un film documentaire en 1980. Les ruines qui peuplent Poveglia aujourd’hui sont tout simplement celles d’une maison de repos pour personnes âgées.
Si l’histoire passée de Poveglia alimente toutes les suppositions, son histoire future n’est pas en reste. En 2014, le gouvernement italien annonce son intention de se séparer de l’île. Poveglia est mise aux enchères. Cela s’est jouée entre deux dossiers. Celui du collectif Poveglia per Tutti, qui a rassemblé 440 000 euros grâce à un souscription de citoyens qui souhaitent faire de Poveglia un lieu pour tous, écologique et citoyen et éviter qu’il ne devienne un énième lieu de villégiature pour les plus fortunés de la planète. Face à eux, le maire de Venise qui a mis sur la table 513 000 euros, comptant bien transformer les bâtiments en hôtel de luxe. Si ce dernier a officiellement gagné, l’agence publique italienne chargée d’organiser les enchères a finalement refusé cette offre, l’estimant «insuffisante».
Poveglia reste donc pour l’instant vide, et délabrée, avec pour seuls visiteurs des chasseurs de fantômes qui continuent à alimenter les plus folles rumeurs…
Voilà maintenant, Poveglia, vous connaissez.
Pour ré-écoutez cette chronique, c’est ici. Vous connaissez ? est diffusée tous les vendredis à 8h30, 12h30 et 16h30 sur Radio Balises, en streaming et sur le 99.8 FM sur le pays de Lorient.
